Rappelons tout d’abord que nous sommes dans une réserve naturelle, au sein d’un parc naturel régional, sur un site qui a déjà beaucoup souffert d’une fréquentation intense et parfois désordonnée et qu’il convient d’en respecter intégralement la moindre végétation afin de la sauvegarder et de pouvoir transmettre ce patrimoine unique. Sachons regarder, observer, en prenant soin de ne pas abîmer, cueillir ou piétiner.
Comme sur le reste du massif des Hautes Vosges la végétation est en partie représentée par une flore alpine que, souvent, on ne rencontre, dans les Alpes mêmes, qu’aux environs de 2000 m (les Vosges ne culminent, au Grand Ballon précisément, qu’à 1424 m). Parmi les cesorophytes (plantes vivant sur les reliefs et en montagne) signalons les printanières, précoces, qui percent souvent les dernières neiges : corydale, scille, gagée, nivéole.
Elles sont liées au hêtre et profitent des forêts au feuillage encore dégarni qui leur permet de capter toute la lumière nécessaire à leur cycle de vie. Elles sont le plus souvent pollinisées par les insectes et disséminées par les fourmis. Beaucoup contiennent des alcaloïdes toxiques mais néanmoins, comme c’est souvent le cas, utilisées en pharmacie : celui contenu dans le bulbe des corydales, par exemple, est utilisé pour lutter contre la maladie de Parkinson.
Restons avec les belles toxiques et précoces : le bois joli se rencontrera fréquemment. Ses belles fleurs apparaissent avant les feuilles sur sa tige en rameau. L’on dit que les marcaires l’utilisaient pour régler leurs différends : plongée dans la source ou dans l’abreuvoir la plante intoxiquait (légèrement) le bétail du voisin…
Vers la fin du printemps les cohortes d’anémones pulsatiles annoncent l’exubérante floraison estivale (la saison est courte, l’automne et les premiers froids arrivant rapidement en montagne il faut hâter la reproduction) : renouée bistorte, trolle, adénostyle, aconit, phalangère, pédiculaire, potentille, fenouil des Alpes et genêt velu envahissent les sommets, les flancs, les combes, les chaumes, les rochers, chacune ayant son emplacement vital (son biotope), à l’exclusion de tout autre et, si telle plante est largement installée dans les combes humides et ombragées, il sera absolument impossible qu’elle s’implante dans une zone rocheuse exposée au sud.
D’autres fleurs, typiquement montagnardes et alpines, sont beaucoup plus rares mais l’on peut parfois admirer le tabouret qui fait des coussins de grappes serrées, ou l’androsace couleur de chair se serrant dans les failles rocheuses, l’élégant lis martagon, l’œillet superbe. Toutes ces espèces étant particulièrement rares, fragiles et protégées, sachons sauvegarder ce patrimoine, l’admirer ou le photographier, sans le cueillir et sans le piétiner… Parmi les espèces typiquement locales ou, parfois même, les raretés : la pensée des Vosges, l’unique station d’un myosotis odorant, l’épilobe de Durieu, la centaurée scabieuse, la mulgédie de Plumier, l’angélique des Pyrénées, l’épervière de Mougeot.